Même si on peut penser que les Anglais, peuple extraordinaire, finiront par rebondir après ce vote absurde et bien des péripéties pénibles qu’ils auraient pu s’éviter, et nous éviter, que la contagion sera limitée, et que l’idée arrogante de les «punir» ne tiendra pas, l’essentiel pour nous n’est pas là. Il serait périlleux pour la France de miser sur une relance forcée de tout ce qui a conduit à la dégradation actuelle -, au-delà du cas britannique, le risque de décrochage des peuples – et qui fera long feu.
Les milieux les plus intégrationnistes, les psalmodiants de l’»Union sans cesse plus étroite» se refusent à analyser les causes de ce vote autrement que comme un «populisme», mot fourre-tout, une aberration britannique se séparant d’une Europe qui jusqu’ici marchait bien! C’est un rêve. L’évidence que l’Union s’est mêlée trop, de tout, et de n’importe quoi, abusivement et lourdement, que trop de promesses exagérées se sont retournées contre elle, est escamotée. C’est seulement la ligne suivie qui aurait été mauvaise, (la fameuse «austérité», pour mettre fin à un endettement toujours aggravé) et pas l’abus de décisions détaillées au niveau européen, confiscatoire de la démocratie. D’où l’idée d’une «relance» à l’identique : création d’un ministre des finances de la zone euro, d’un trésor, d’un budget, etc. (sans même un contrôle des parlements nationaux) : on ne voit pas en quoi cela enthousiasmerait les sceptiques ou les allergiques, sans même parler des anti-européens. L’accord de l’Allemagne n’est même pas assuré. Et si cela signifie de changement de traités, serait-il ratifiable? Bref, échec probable à terme, et découragement ultérieur accru par erreur de diagnostic sur l’origine du rejet.
Une approche, apparemment meilleure, circule : celle de recentrer l’Europe sur les sujets «qui intéressent les gens» : on cite la sécurité, la défense, la croissance, l’emploi, l’immigration. C’est en partie fondé. Mais chaque point se discute. La sécurité? C’est refaire un Schengen viable et contrôlable, très bien. La défense? Intéressant si tous les pays d’Europe sont prêts à hisser leur budget de la défense à 2% du PIB pour constituer ensuite le pilier européen de l’alliance atlantique. Sinon, on ne parle que de coopérations industrielles dont on connait les difficultés. L’immigration? Oui, gérons enfin les flux avec les pays de départ, et de transit. Mais la croissance, l’emploi, etc : L’Europe finirait donc par s’occuper d’encore plus de choses? Et finalement, de tout? Par conséquent être responsable de tout? N’est-ce pas aggraver ce qui a nourri déjà le mécontentement général? Et n’est-ce pas totalement incohérent avec l’aspiration des peuples à une démocratie plus proche? Ce serait une pompe aspirante, soit le contraire exact du principe de subsidiarité. Donc empilement, accumulation et dépossession accrue des démocraties nationales. Surtout si rien n’est fait au préalable pour restituer des compétences au niveau national et stopper la furie normalisatrice, des partenaires de la codécision communautaires. Ce «plus d’Europe», quoique mieux présenté, est voué lui aussi au bout du compte, à un échec probable.
«Tenir compte des peuples», comme certains le redécouvrent (ah oui, c’est vrai zut, il y a les peuples!) signifierait d’abord, avant toute autre proposition, que les gouvernements convaincus créent une sorte de Commission de la Hache, et imposent à la Commission et au Parlement, par une subsidiarité massive et drastique, une authentique diète normative stoppant l’autisme réglementaire hypertrophié. Reconnaissons d’ailleurs que les Etats ont eux-mêmes, tout à tour, la France en tête, alimenté cette fuite en avant. Mais seule la Commission en a fait sa raison d’être. Et cela ne change rien au problème, et à la nécessité de le résoudre.
Certes, on peut comprendre que la Commission Européenne, et le Parlement européen, ne puissent soutenir une telle approche, même si la lucidité de Jean Claude Juncker et de Franz Timmermans doit être saluée. On peut comprendre également que, en France notamment, deux ou trois générations qui avaient fini par faire de l’intégration européenne le combat de leur vie, après que toutes leurs autres croyances se soient effondrées, se sentent totalement perdues, et se raccrochent à ce viatique. Comme si la liberté, l’ouverture, le bonheur, l’espoir, l’amitié entre les peuples, ne dépendraient que de la seule forme d’intégration communautaire des deux dernières décennies! Amis, redescendez sur terre, le moment est venu de penser tout à fait autrement, pour sauver l’idée européenne, en la libérant de l’européisme.
C’est pour cela qu’il me semble que pour enrayer la désaffection croissante des peuples, dont le Brexit n’est que le signe le plus spectaculaire, les gouvernements les plus déterminés, devraient convoquer sans tarder une nouvelle conférence de Messine, fixer rapidement les contours d’une nouvelle subsidiarité rétroactive, et assigner après cela quelques rares missions clefs (sécurité, influence, préparation de l’avenir) à cette Union repensée pour assurer la pérennité de mode de vie européen dans le monde de demain, tout en laissant la démocratie retrouver son espace et sa légitimité au sein de chaque Etat membre.
Même si on peut penser que les Anglais, peuple extraordinaire, finiront par rebondir après ce vote absurde et bien des péripéties pénibles qu’ils auraient pu s’éviter, et nous éviter, que la contagion sera limitée, et que l’idée arrogante de les «punir» ne tiendra pas, l’essentiel pour nous n’est pas là. Il serait périlleux pour la France de miser sur une relance forcée de tout ce qui a conduit à la dégradation actuelle -, au-delà du cas britannique, le risque de décrochage des peuples – et qui fera long feu.
Les milieux les plus intégrationnistes, les psalmodiants de l’»Union sans cesse plus étroite» se refusent à analyser les causes de ce vote autrement que comme un «populisme», mot fourre-tout, une aberration britannique se séparant d’une Europe qui jusqu’ici marchait bien! C’est un rêve. L’évidence que l’Union s’est mêlée trop, de tout, et de n’importe quoi, abusivement et lourdement, que trop de promesses exagérées se sont retournées contre elle, est escamotée. C’est seulement la ligne suivie qui aurait été mauvaise, (la fameuse «austérité», pour mettre fin à un endettement toujours aggravé) et pas l’abus de décisions détaillées au niveau européen, confiscatoire de la démocratie. D’où l’idée d’une «relance» à l’identique : création d’un ministre des finances de la zone euro, d’un trésor, d’un budget, etc. (sans même un contrôle des parlements nationaux) : on ne voit pas en quoi cela enthousiasmerait les sceptiques ou les allergiques, sans même parler des anti-européens. L’accord de l’Allemagne n’est même pas assuré. Et si cela signifie de changement de traités, serait-il ratifiable? Bref, échec probable à terme, et découragement ultérieur accru par erreur de diagnostic sur l’origine du rejet.
Une approche, apparemment meilleure, circule : celle de recentrer l’Europe sur les sujets «qui intéressent les gens» : on cite la sécurité, la défense, la croissance, l’emploi, l’immigration. C’est en partie fondé. Mais chaque point se discute. La sécurité? C’est refaire un Schengen viable et contrôlable, très bien. La défense? Intéressant si tous les pays d’Europe sont prêts à hisser leur budget de la défense à 2% du PIB pour constituer ensuite le pilier européen de l’alliance atlantique. Sinon, on ne parle que de coopérations industrielles dont on connait les difficultés. L’immigration? Oui, gérons enfin les flux avec les pays de départ, et de transit. Mais la croissance, l’emploi, etc : L’Europe finirait donc par s’occuper d’encore plus de choses? Et finalement, de tout? Par conséquent être responsable de tout? N’est-ce pas aggraver ce qui a nourri déjà le mécontentement général? Et n’est-ce pas totalement incohérent avec l’aspiration des peuples à une démocratie plus proche? Ce serait une pompe aspirante, soit le contraire exact du principe de subsidiarité. Donc empilement, accumulation et dépossession accrue des démocraties nationales. Surtout si rien n’est fait au préalable pour restituer des compétences au niveau national et stopper la furie normalisatrice, des partenaires de la codécision communautaires. Ce «plus d’Europe», quoique mieux présenté, est voué lui aussi au bout du compte, à un échec probable.
«Tenir compte des peuples», comme certains le redécouvrent (ah oui, c’est vrai zut, il y a les peuples!) signifierait d’abord, avant toute autre proposition, que les gouvernements convaincus créent une sorte de Commission de la Hache, et imposent à la Commission et au Parlement, par une subsidiarité massive et drastique, une authentique diète normative stoppant l’autisme réglementaire hypertrophié. Reconnaissons d’ailleurs que les Etats ont eux-mêmes, tout à tour, la France en tête, alimenté cette fuite en avant. Mais seule la Commission en a fait sa raison d’être. Et cela ne change rien au problème, et à la nécessité de le résoudre.
Certes, on peut comprendre que la Commission Européenne, et le Parlement européen, ne puissent soutenir une telle approche, même si la lucidité de Jean Claude Juncker et de Franz Timmermans doit être saluée. On peut comprendre également que, en France notamment, deux ou trois générations qui avaient fini par faire de l’intégration européenne le combat de leur vie, après que toutes leurs autres croyances se soient effondrées, se sentent totalement perdues, et se raccrochent à ce viatique. Comme si la liberté, l’ouverture, le bonheur, l’espoir, l’amitié entre les peuples, ne dépendraient que de la seule forme d’intégration communautaire des deux dernières décennies! Amis, redescendez sur terre, le moment est venu de penser tout à fait autrement, pour sauver l’idée européenne, en la libérant de l’européisme.
C’est pour cela qu’il me semble que pour enrayer la désaffection croissante des peuples, dont le Brexit n’est que le signe le plus spectaculaire, les gouvernements les plus déterminés, devraient convoquer sans tarder une nouvelle conférence de Messine, fixer rapidement les contours d’une nouvelle subsidiarité rétroactive, et assigner après cela quelques rares missions clefs (sécurité, influence, préparation de l’avenir) à cette Union repensée pour assurer la pérennité de mode de vie européen dans le monde de demain, tout en laissant la démocratie retrouver son espace et sa légitimité au sein de chaque Etat membre.